Le Parisien, vendredi 23 mai 2003
 

Le Bourget : 150 Roms s'installent sur la friche industrielle


LE BOURGET, ZAC DU COMMANDANT-ROLLAND, HIER APRES-MIDI. Environ 150 Roms ont pris leurs quartiers sur cette friche industrielle dans la nuit de dimanche à lundi.   (LP/V.M.)

    «IL EST OÙ LES PAPAS ? », interroge, hier après-midi, une jeune fille rom avant de quémander une paire de lunettes pour ses yeux fatigués. « Les papas », au total vingt-quatre Tziganes roumains, sont en fait en garde à vue au commissariat de La Courneuve. Les policiers ont interpellé les « chefs de famille » au saut du lit de leur caravane, hier matin vers 7 heures, sur la ZAC du Commandant-Rolland au Bourget, en limite de Drancy. Cette intervention, rendue possible par la nouvelle loi Sarkozy sur la sécurité intérieure, fait suite à la plainte du maître des lieux, la société Alstom, pour « intrusion illicite sur un terrain d'autrui ». Dans la nuit de dimanche à lundi en effet, environ 150 Roms qui avaient été contraints de quitter le campement de la rue de l'Industrie à Saint-Denis à la fin du mois d'avril dernier, ont élu domicile sur cette friche industrielle où doivent se construire, à l'avenir, des bureaux et des logements*. Dans des conditions d'hygiène déplorables, ces exilés (sur)vivent dans une cinquantaine de caravanes en très mauvais état.

    « Il n'y a jamais de place pour nous » Tout au long de la journée, hier, les enquêteurs ont vérifié si les Roms étaient en situation régulière ou non. Sur les 24 personnes interpellées, 21 étaient en possession d'un passeport. Elles ont été remises en liberté dans la soirée et seront convoquées en septembre devant le tribunal de Bobigny. Pour trois autres Tziganes, la garde à vue devait, hier soir, être prolongée. Deux n'avaient pas de papiers et un dernier était recherché par les forces de l'ordre. Pendant que les hommes étaient interrogés, leurs familles ne cessaient de se lamenter sur le terrain vague inondé de tas de gravats et d'arbustes sauvages. « Il n'y a jamais de place pour nous. A chaque fois que l'on s'installe quelque part, on nous fait des malheurs », lançait un adolescent de 16 ans, entouré d'une bande de gamins les mains salies par la terre. « Il y a une plainte du propriétaire, il y a des lois qui s'appliquent », s'est contenté de réagir, dans la soirée, Vincent Capo-Canellas, maire UDF du Bourget. Loin d'être résolue, « la question Rom » continue de se poser d'une commune à l'autre, au gré des expulsions.

* Une promesse de vente a été signée entre deux promoteurs immobiliers (Nexity et Meunier) et le groupe Alstom

Vincent Mongaillard